Par Marie-Christine Gauthier
Centre de ressources communautaires de la Basse-Ville
Vous croyez peut-être que de travailler à la réception du Centre de ressources communautaires de la Basse-Ville ne consiste qu’à prendre des appels, à répondre aux courriels et à gérer les rendez-vous, mais je pourrais écrire un roman complet au sujet du travail à la réception. Le fait est que chaque jour est très différent. Techniquement, les journées commencent toutes de la même façon : le déverrouillage des portes de nos bureaux situés au 40 Cobourg, l’ouverture de la grille autour de la réception, l’installation des ordinateurs portatifs à la disposition du public, la vérification des messages téléphoniques et la rédaction de la liste d’employés sur place. Par la suite, la journée prend une tout autre tournure…
Le fait d’être une réceptionniste dans un centre de ressources communautaires implique de devoir accomplir plusieurs tâches : effectuer le dépannage technique, résoudre des problèmes, avoir une oreille compatissante, être humoriste, contrôler la circulation, dénicher des ressources, rédiger des traductions et défendre les droits des personnes. Il s’agit surtout d’une occasion d’aider les gens de manière concrète. Parfois, ce ne sont que de petites choses, comme de chercher un numéro de téléphone ou une adresse, imprimer des formulaires ou diriger des personnes vers une ressource. Mais souvent, il s’agit de quelque chose de plus important comme de traduire une lettre du gouvernement en termes que les gens peuvent bien comprendre, ou encore d’écouter quelqu’un qui a vraiment besoin de discuter parce qu’il se sent seul ou qu’il a passé une très mauvaise journée (ou semaine).
Il y a également des histoires qui vous brisent le cœur : des gens qui ont faim et qui n’ont pas assez de nourriture pour eux ou leurs enfants, ou encore ceux qui n’ont pas accès à un logement stable ou dont le logement est inadéquat. Certains sont aux prises avec des problèmes de punaises de lit ou de rats, et d’autres sont incapables de trouver des ressources pour leurs enfants handicapés. Puis, il y a les demandes qui sont carrément bizarres : la personne qui demande de l’aide à cause de la présence d’un fantôme dans son immeuble; le client qui veut organiser une rencontre avec Stephen Harper, le pape (pas le pape actuel, celui qui le précède) et Barack Obama (lorsqu’il était président); ou l’interlocuteur qui veut les horaires de cinéma pour aller voir le film Cinquante nuances de Grey.
Vous développez rapidement l’art de l’écoute avec attention — tout en gardant votre sérieux — peu importe ce que les gens vous disent. Vous apprenez également à écouter et à saisir la signification plus subtile cachée derrière la demande initiale. Il est souvent difficile pour les gens de demander directement l’aide dont ils ont réellement besoin; il peut s’écouler un certain temps avant d’en arriver à parler du vrai problème. Et lorsque les gens s’ouvrent finalement, il est important d’échanger avec eux en faisant preuve de respect, tact, discrétion et compassion.
J’adore travailler à la réception parce que j’apprécie vraiment être auprès des gens. Au fil des ans, j’ai noué des relations de confiance avec de nombreux résidents. Je les connais par le biais des écoles que nos enfants fréquentent, et aussi parce que l’on se croise à la piscine de la Basse‑Ville, à la bibliothèque Rideau, à l’épicerie ou aux réunions communautaires, car j’habite moi-même dans le coin. Mais surtout, j’ai appris à les connaitre grâce à nos discussions lorsqu’ils attendent de rencontrer un de nos travailleurs sociaux ou organisateurs communautaires. Être une réceptionniste, c’est un peu comme être une serveuse de bar : les gens vous confient des choses. Ils me parlent de leurs familles, de leur travail, de leurs études et des autres choses qui se passent dans leur vie. Nous discutons par exemple de problèmes de santé et des ressources disponibles pour un enfant qui a des problèmes à l’école. Nous échangeons également nos remèdes maison contre les petits ennuis de santé, ainsi que nos conseils de cuisine! Œuvrer à titre de réceptionniste au Centre de ressources communautaires de la Basse-Ville me pousse à utiliser mes compétences et ma créativité de façon quotidienne. Cela me donne l’impression de redonner à la communauté et de faire une différence. Je me considère comme étant privilégiée de pouvoir faire un travail important, au sein de ma communauté, avec des gens que je respecte, et pour une organisation qui possède une mission et des valeurs auxquelles je m’associe.